Traquemort - Tome 1 : Le Proscrit - Simon R. Green

Publié le par Roman Littleson

Avec un peu de retard, puisque j’ai terminé un autre livre entre temps, je vous fais part de mon avis concernant le premier tome, sur huit, de la série de science-fiction Traquemort, de l’écrivain Simon Richard Green, spécialisé dans la science-fiction et la fantasy.

 

Ce premier tome nous emmène dans un lointain futur (par ailleurs non daté), dans lequel l’humanité a conquis une partie de l’espace et constitué un empire. À sa tête, Lionnepierre XIV, impitoyable, cruelle, ne faisant confiance à personne, au point d’avoir pour servantes des jeunes femmes « reprogrammées ».

 

Owen Traquemort, héritier d’une noble famille, s’est exilé sur Virimonde afin d’échapper aux souvent mortelles intrigues de la cour. Préférant l’érudition (il est historien) aux armes, il étudie les origines de l’empire, tranquillement, insouciamment, lorsque, ignorant encore qu’il vient d’être proscrit par l’impératrice, tout son entourage, à commencer par sa maîtresse, veut le tuer. Il parvient à s’échapper de son monde, grâce à Hazel d’Ark, une jeune femme, devenue hors la loi et pirate, qui venait d’échapper au naufrage du vaisseau sur lequel elle avait embarqué.

Tous deux vont fuir sur Brumonde, seule planète où l’empire n’a pas d’emprise, mais peuplée de hors la loi. De là, suivant des indications laissées par le père d’Owen, ils vont rencontrer Jack Hasard, rebelle « professionnel », qui a tenté de nombreuses entreprises contre l’empire, sans grand succès. D’autres compagnons vont les rejoindre : une chasseuse de primes, un cyborg et même, par la suite, le légendaire ancêtre d’Owen, qui a traversé les siècles en état de stase. Ensemble, ils vont tenter de lever une armée contre le maléfique empire.

 

En parallèle, on nous présente Valentin Wolfe, Finlay Campbell issus de nobles familles qui conspirent sans cesse les unes contre les autres pour avoir le plus d’influence possible (en l’occurrence pour avoir le droit de produire un système de propulsion révolutionnaire, issu de la technologie extraterrestre). À noter que ces luttes sont également internes aux familles. Complots contre ses propres parents, ses frères et sœur, etc.

 

Et puis surtout, il y a ces réseaux souterrains qui conspirent contre l’impératrice. Constitués pour la plupart de minorité, ils veulent une reconnaissance de leur statut d’être humain. Clones, espsis (humains améliorés, possédant un pouvoir télépathique), considérés comme des objets, pirates informatiques, bref, tout le bas peuple méprisé par le pouvoir.

 

Pour finir, une autre menace plane, celle de deux civilisations extraterrestres à la technologie très probablement supérieure.

 

 

 

Qui dit science-fiction, dit technologies futuristes, à commencer par celles permettant de voyager dans l’espace, les vaisseaux spatiaux, et d’habiter d’autres planètes.

La seconde, très présente, c’est celle des implants, qui permettent à leurs porteurs d’améliorer ses capacités, le temps d’un combat par exemple, ou de communiquer avec leur IA. Concernant les membres de la famille Traquemort, ils possèdent la capacité du Turbo, qui leur permet une plus grande vitesse, une plus grande résistance, une plus grande force. Une capacité dangereuse, tant pour l’utilisateur (mal utilisée, elle peut le tuer), que pour son adversaire.

Les patchs de drogues (pas forcément légales) sont également utilisés, par Valentin Wolfe notamment, lui conférant là aussi, le temps d’un combat, de meilleures capacités. Mais elles lui permettent aussi une meilleure réflexion, analyse des situations, et certainement bien d’autres encore.

L’autre technologie très présente, est celle de la génétique et du clonage, et de manière générale, qui sert à améliorer les êtres humains pour en faire des armes. Ces individus perdent d’ailleurs leur statut d’êtres humains dans le même temps. Espsis (dotés de pouvoir télépathiques), clones, wampires, cyborgs…

Enfin, les armes à énergie ont un rôle important. Puissantes, elles ont néanmoins une faiblesse de taille. En effet, après un tir, le cristal qui les alimente en énergie met deux minutes à se recharger après un tir uniquement. Ce qui justifie un mode de combat qui, lui, tire plus de la fantasy.

 

 

En effet, une fois le disrupteur déchargé, c’est l’épée qui prend le relai. Les nobles de ce siècle futuriste sont formés dès l’enfance au maniement de la lame.

Des arènes dignes de la Rome antique font s’affronter gladiateurs (parfois entre eux), créatures toutes plus dangereuses les unes que les autres. Elles ont leur héro, le fameux gladiateur masqué, invaincu.

De même l’organisation de la cour avec ses intrigues, ses familles nobles serait tout à fait transposable dans un univers plus « classique ».

 

 

 

Alors, est-ce que j’ai aimé ? Pour commencer, autant dire que rarement un livre m’a fait cet effet-là. D’un côté l’histoire m’a passionné, d’un autre, certaines choses m’ont quelque peu dérangé. Mais au final, j’ai quand même envie de découvrir la suite, et c’est bien là l’essentiel.

 

L’univers est riche, bien construit, l’histoire est  passionnante, et l’écriture est bonne.

Cela dit, j’ai un peu moins été emballé par le rythme. En édition de poche, le roman fait près de huit cents pages, et au final on n’a pas l’impression qu’il se passe grand-chose. Du moins, si on prend séparément la trame de chaque personnage. C’est peut-être le problème de ce roman d’ailleurs. Il se disperse beaucoup, surtout au début, pour nous présenter différents personnages liés à différentes intrigues. Ce qui fait qu’on a du mal à s’attacher immédiatement à ces personnages. Par exemple, Owen Traquemort, après avoir été présenté au second chapitre, ne réapparait qu’au chapitre cinq. Dit de cette manière, ça paraît assez court, mais les chapitres sont longs. En termes de pages, cela fait plus d’une centaine entre les deux apparitions du personnage. D’ailleurs, huit cent pages, partagées en treize chapitres, chacun plus ou moins consacré à une des intrigues, et plus particulièrement à un événement qui fait avancer celle-ci. Ce qui laisse finalement peu d’occasion à chaque intrigue d’avancer.

Cela dit, une fois ces intrigues lancées, on a bien envie de voir comment elles vont évoluer.

 

Ce qu’on peut aussi noter, c’est aussi ce pessimisme dans l’œuvre. De la cruauté à tous les niveaux, à commencer par l’impératrice elle-même, mais aussi au sein de la cour, des familles elles-mêmes. Le manque de confiance : personne n’a confiance en personne ou presque, même les principaux personnages. Il y a par exemple de la méfiance au sein du groupe d’Owen Traquemort. On craint que la chasseuse de primes ne trahisse, on craint que ce soit le cyborg, Hazel d’Ark n’apprécie guère Owen à cause de son statut d’aristo. Trahison, au sein même du groupe mené par Owen (cela dit, dès que l’existence d’un traitre est évoquée par l’impératrice, on devine aisément de qui il s’agit).

Ce qui peut être gênant par moments, c’est une espèce de surenchère, visant à nous montrer à quel point ce monde est pourri. Exécution en public à la cour (un petit fils qui assassine son grand-père sur ordre de l’impératrice), un chef de clan qui étrangle une nièce le jour de son mariage parce qu’elle était enceinte, et ce dans l’indifférence générale : en effet, les mariages ne sont pas d’amour, mais arrangés ; ainsi quelle meilleure solution pour laver son honneur et montrer sa bonne fois à la belle-famille que d’éliminer la jeune femme ? Un fils poignarde son père, vendetta entre deux familles dont l’une finit décimée, inceste… On voit bien à quel point ce monde est vraiment cruel !

Mais c’est sans parler des diverses créatures, plus écœurantes les unes que les autres, allant de l’humain « amélioré » (wampires, espèce de grosse larve géantes aux pouvoirs psychiques qui garde la prison) à la faune extraterrestre munie de toujours plus de dents, de griffes, toujours plus résistante et difficile à vaincre.

L’horreur est également présente dans les combats, à commencer par ceux de l’arène, dont le principe, de se faire entretuer des êtres vivants, est barbare. Le gladiateur masqué ne trouvera pas d’autre solution que de se transpercer l’abdomen (de manière calculée certes) pour vaincre un de ses adversaires qui se trouve dans son dos. Toujours dans les combats, l’épouse d’un noble se retrouve éventrée, les têtes des espsis, qui ne supportent pas certains chocs psychiques, explosent en éclaboussant les autres de morceaux de cervelle, certains sont déchiquetés, décapités. Chaque combat est un véritable massacre.

L’être humain (et vivant de manière générale) a peu de valeur et est réduit à l’état d’objet. On le modifie, on s’en sert d’arme, on remplace un amant disparu ou une fille assassinée par un clone…

 

Et l’amour dans tout ça ? Parce qu’il n’existe aucun roman sans bonne histoire d’amour.

Et bien dans un tel monde, il y a finalement peu de place pour l’amour. À commencer par l’amour au sein des familles. Les enfants n’aiment par leurs parents, les parents n’aiment pas leurs enfants (ou du moins n’aiment généralement pas l’ainé qui doit pourtant succéder), les frères et sœurs ne s’aiment pas entre eux, les compagnons de voyage ne s’apprécient pas non plus (quoiqu’on entrevoir une histoire future entre Owen et Hazel). Les mariages sont arrangés et donc les couples mariés ne s’apprécient pas non plus. De même, Valentin Wolfe, que son père veut marier à une fille qu’il ne connaît pas, est totalement indifférent.

Il y a bien quelques traces d’amour, rares. Mais celles-ci sont soit clandestines (comme celle entre Finlay Campbell et Évangéline Shreck), ou bien éphémères (Robert Campbell doit être marié à une jeune fille qu’il ne connaît pas, issue du clan Shreck. Allant à l’encontre de la tradition, Adrienne Campbell, épouse de Finlay, présente les deux amoureux juste avant la cérémonie. On peut deviner un intérêt que chacun des deux porte à l’autre et un certain espoir de s’aimer. Or la déception ne se fait pas attendre, la jeune femme, enceinte, se faisant tuer par son oncle dans l’indifférence générale, excepté celui qui aurait dû être son époux, qui ne peut malheureusement rien faire pour empêcher le meurtre).

 

Concernant les personnages ce n’est pas à ceux composant la petite troupe d’Owen Traquemort que j’ai préféré. À mes yeux, Finlay Campbell et Valentin Wolfe sont bien plus intéressants, qui ne sont pas du tout ce qu’ils laissent paraître, à leurs proches mêmes. Une préférence néanmoins pour le second, ambitieux, et certainement le plus dangereux de tous. C’est aussi le plus imprévisible je pense et l’on a envie de savoir quel sera son rôle à venir.

 

Juste une petite remarque concernant l’impératrice Lionnepierre.

Tout d’abord son rang, quatorzième du nom, renvoie tout de suite à celui d’un certain Louis, roi de France, monarque absolu par excellence.

Ensuite, son surnom, « la Garce de Fer », n’est pas sans rappeler celui d’une célèbre dirigeante des années 80.

Comprenne qui pourra…

 

 

Pour conclure, Le Proscrit, premier tome de la série Traquemort, est un bon roman, qui pose les bases d’un univers et d’intrigues riches. On peut regretter une surenchère de violence (au bout d’un moment on a bien compris que tout est toujours plus pourri que le reste), ainsi que le découpage en si longs chapitres, privant le lecteur de certains personnages durant de trop  longs passages, ce qui n’aide pas vraiment à s’attacher à eux immédiatement.

Cela dit : « Le décor était dressé, les acteurs en place. » Voici l’avant dernière phrase du roman qui résume parfaitement le rôle du premier volet d’une saga. On ne peut que constater que l’objectif est atteint. Vivement la suite pour entrer dans le vif du sujet !

Traquemort - Tome 1 : Le Proscrit - Simon R. Green
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